|
Passage de la frontière
Après avoir quitté
notre douanier thailandais inquiet. Nous arrivons devant le magnifique
drapeau du Cambodge, des dizaines d'enfants accourent vers nous
ainsi que 2 ou 3 faux guides qui nous disent que l'on n' arrivera
jamais a Angkor en vélo, que la route est trop dure, que
l'on va se faire manger par les tigres !!! Bref, nous ne nous
laissons pas intimider.
D'abord il faut faire le Visa, avec tous les rabatteurs et les
faux douaniers qui nous tournent autour, on sent bien la corruption
dans ce pays en pleine reconstruction mais toujours traumatisé
par des années de guerre.
Pendant que Maud fait des sourires au douanier, je fais faire
des tours de tandem à quelques enfants qui soudain deviennent
bien calmes, une fois sur le tandem !!! Bref, on arrive a obtenir
notre beau tampon sur notre passeport et hop, c'est parti. D'un
coup la route goudronnée s'arrête, bienvenue au Cambodge
!
Vu qu'on est en descente, on ne voit pas un check point de police,
et alors que l'on s'est arrête pour prendre une photo, le
policier nous rattrape énerve. On se méfie de ces
check points alors on ne veut pas lui donner nos passeports, il
s'énerve de plus belle et nous tend sa carte de police.
Bon ça ne rigole plus, il veut que l'on fasse demi tour
jusqu'au check point, Maud rechigne toujours à lui donner
nos passeports. Finalement, on cède et il nous demande
d'enlever nos casques pour voir si nos trombines correspondent
à celles des passeports !!! Tout se passe bien et on peut
repartir. La piste est dure, la forêt nous entoure, l'atmosphère
est chaude, nous pénétrons au Cambodge...
La route du nord
La piste commence par une longue
descente bien défoncée, nous découvrons nos
premiers hameaux cambodgiens, ici les gens sont très pauvres
et ça se voit. Les cabanes tiennent à peine debout,
les enfants sont nus ou bien habillés de vêtements
tout troués. Tout ce petit monde éclate de rire
en nous voyant passer. Les gens ont toujours le sourire aux lèvres
et c'est ça qui est le plus touchant, dès qu'on
leur tourne le dos, les enfants rigolent et appellent tout le
village. Quand on s'arrête, c'est l'attroupement et les
gens discutent joyeusement en nous regardant.
Nous sommes dans une zone minée et ça se voit, panneaux
tout le long de la route, 4x4 des ONG de déminage, gens
estropiés qui continuent à faire du vélo
avec une jambe, enfants avec un seul bras, gens brûlés
au visage... C'est terrible et pourtant les Cambodgiens ont cette
joyeuse soif de vivre si émouvante...
Dans notre première petite ville, beaucoup d'ONG sont présentes
Unicef, Mines Adisory, Care... Il y a beaucoup de travail à
faire devant tout ce que les Khmers rouges ont anéanti.
La piste est potable mais devient de plus en plus défoncée
au fur et à mesure que nous avançons, les ponts
sont effondrés et quand ils tiennent encore debout, il
vaut mieux descendre de vélo pour éviter les trous.
Les gens montent à 40 dans un pick-up et descendent à
chaque pont pour le passer, à chaque fois qu'ils nous voient
nous avons le droit à de grands coucous et crises de rire.
Un jour, nous passons sur un vieux pont khmer de l'époque
de l'empire, c'est très impressionnant. Nous pensons qu'il
y a plus de 1000 ans, cette route était pavée, que
l'empire florissait et que maintenant les gens roulent sur des
ponts et pistes défoncées...
Première rencontre avec Daa
Nous rejoignons donc la route principale
à 60km d'Angkor. Nous espérions qu'elle serait en
meilleur état que les pistes mais nous nous trompions...
Cette route est la pire de tout notre voyage, elle est entièrement
défoncée et c'est un calvaire, nous mettons plus
d'une heure pour faire 10 kms. Nos bras tremblent et nous prions
pour le pauvre Fends La Bise qui souffre. Nous arrivons dans un
petit village ou les minibus de touristes venus de l'autre route
de Thailande font une pause pour lavage de voiture. Tout de suite
deux petites filles qui parlent bien anglais nous sautent dessus
en nous demandant ce qu'on cherche, on dit que l'on cherche un
endroit pour dormir. Elles nous indiquent un mini hôtel
mais vu l'état on préfère encore dormir dehors,
en ressortant la petite fille nous approuve et en plus c'est trop
cher !!!
On prend une autre petite route et on demande aux gens si c'est
possible de planter la tente à côté de leur
maison. Finalement nous serons invités, à planter
notre tente au premier étage de la maison du maire !!!
Nous nous lavons au puits et le soir nous retournons dans l'autre
partie du village pour manger. Nous retrouvons les deux petites
filles (Daa et Jane) qui ont 11 ans, nous mangeons notre riz quotidien
chez la soeur de Daa, nous parlons beaucoup avec Daa et Jane qui
se débrouillent en anglais. Elles nous demandent ou nous
dormons, quand nous lui disons que des gens nous ont accueillis,
elle répond "Mais il fallait venir chez moi, je vous aurai
accueillis, vous êtes mes amis maintenant". On lui explique
que l'on vient du nord et qu' après Angkor, on repassera
par son village pour aller à l'ouest. Elle répond
alors "Super, donc quand vous repasserez vous viendrez dormir
chez moi" et elle nous le fait promettre.
Elle offre ensuite un bracelet à chacun "ces bracelets,
je les vends aux touristes d'habitude mais vous, je vous les donne",
nous ne voulons pas, nous voulons lui acheter, mais impossible
elle veut nous les offrir. Nous sommes touchés par cette
petite Daa si mignonne.
La nuit, nous retournons dormir dans la chaleur de notre tente,
toute la famille s'est installée dans le jardin pour attraper
des insectes à l'aide d'une lampe et d'un bassin d'eau.
Ils nous expliquent qu'ensuite ils les feront griller puis les
vendront pour les manger...
Le lendemain matin, nous repartons pour la piste de l'enfer, Daa
nous rattrape et nous offre un petit pain pour la route et nous
dit qu'elle nous attend ici quand on repassera...
A l'école hôtelière
Nous continuons donc notre route
vers l'ancienne capitale de l'empire khmer. La piste est vraiment
horrible et les camions vont à peine plus vite que nous.
Certains sont embourbés car ils ont voulu passer à
côté de la route ! Les gens sur les pick-up sont
secoués comme jamais.
Comme par miracle la route est de nouveau goudronnée 20
kms avant Siem Reap, on sent qu'on approche d'un lieu touristique
: hôtels par dizaines, aéroport international, banques,
Internet... ce n'est pas le même Cambodge. Mais malgré
tout les gens sont aussi adorables et sympas que dans le reste
du Cambodge. Le tourisme à Angkor, c'est la grande chance
de développement de ce pays, seulement ils ont oublié
de faire le plan d'urbanisme de Siem Reap... Nous arrivons donc
à l'école hôtelière Paul Dubrule où
nous sommes accueillis par toute l'équipe de jeunes profs
et par les élèves cambodgiens. Cette école
a été fondée par Paul Dubrule dans le but
de former des Cambodgiens aux métiers du tourisme et de
l'hôtellerie, métiers qui leur étaient généralement
inaccessibles dans leur propre pays. L'école a pour vocation
dans les annees futures, d'être entièrement gérée
par des Cambodgiens.
Quel contraste de se retrouver ici après ces journées
difficiles sur les pistes, nous faisons notre première
vraie lessive depuis l'Australie, nous avons l'occasion de parler
beaucoup français avec la bonne bande d'expats qui compose
le staff de cette école dynamique. Nous apprenons ainsi
beaucoup sur le Cambodge et la vie des expats ici. Nous donnons
une conférence diaporama aux élèves de l'école,
c'est super d'avoir un peu de temps pour enfin trier nos photos.
Les jeunes Cambodgiens sont très surpris, notamment des
photos de déserts, de volcans et d'enfants africains à
la peau très noire !!! Bref, c'est un super repos et une
bonne occasion de voir toutes les actions qui sont menées
pour le développement de ce pays. Merci encore à
toute l'équipe et à Monsieur Paul Dubrule.
Découverte d'Angkor
Cette halte nous permet de découvrir
le site grandiose d'Angkor. Et là, nous tombons réellement
en admiration, je pense que l'on ne peut pas expliquer tant que
l'on n'a pas vu. Une cité entière de temples hindouistes
et bouddhistes, et de palais se cache sous la forêt. Ce
sont les vestiges du puissant empire khmer qui vit son apogée
vers l'an 1200. Outre les temples grandioses, ce sont des murailles
de plusieurs kilomètres de long avec des arbres qui poussent
dessus, des bas-reliefs magnifiques. Nous explorons tout ceci
avec Fends La Bise, nous parcourons les petits chemins oubliés
qui nous mènent dans des temples où il n'y a personne,
nous escaladons les ruines, jouons à Indiana Jones dans
les lianes. Il y a des temples qui sont complètement déformés
par la jungle qui a littéralement pris le dessus sur la
pierre. C'est incroyable de penser que les vestiges de cet empire
si puissant se trouvent désormais dans un des pays les
plus pauvres du monde. Les singes sont de la partie et nous piquent
nos gourdes à chaque fois qu'ils le peuvent, le site est
immense et il reste de grandes zones qui n'ont pas encore été
fouillées. C'est réellement prodigieux. Les Cambodgiens
sont fiers d'Angkor : il est sur leur drapeau national, c'est
le nom de leur bière, de leur radio... C'est leur fierté,
ils aimeraient tant la retrouver en effaçant du passé
les épisodes sombres des Khmers rouges.
A l'orphelinat
Après ces magnifiques jours
passés à Angkor, nous quittons donc nos nouveaux
amis français pour nous relancer sur la piste terrible
(encore plus triste de penser que cette route était goudronnée
il y a 40 ans et que la guerre a tout détruit). Nous allons
visiter un orphelinat à Siem Reap. Cet orphelinat est entièrement
géré par des Cambodgiens, ils se chargent de voir
dans les villages s'il y a des enfants abandonnés. Il y
a environ 50 enfants. C'est une vraie petite communauté
qui respire le bonheur. Il y a une maison en bois sur pilotis
par groupe de 6 enfants avec un éducateur. Les enfants
ont une ferme pour apprendre les métiers de l'agriculture,
une salle commune avec des livres. C'est vraiment super. Nous
avons même le droit à de beaux dessins pour l'Unicef.
Merci à toute l'équipe (nous mettrons prochainement
en ligne les coordonnées de l'orphelinat si vous souhaitez
l'aider).
De retour chez Daa
Après être retournés
sur la route terrible, nous sommes heureux de retrouver Daa dans
le village de Kralaghn, elle nous attendait de pied ferme. "Vous
voulez toujours venir chez moi ?" nous dit elle, elle semble
moins gaie que la dernière fois, on sent qu'elle est un
peu honteuse de nous montrer où elle habite. Elle nous
dit "petite maison, pas de toilettes, no problem for you
? " Elle est soulagée quand nous lui répondons
que tout va bien. Nous prenons plusieurs petits chemins pleins
de boue pour enfin arriver dans un sous village. Daa nous présente
à ses parents, elle nous emmène chez les voisins
pour que nous puissions nous laver car sa bassine n'est, selon
elle, pas assez grande. Nous sommes vraiment touchés. Ensuite
sa mère nous prépare un plat de riz aux herbes,
Daa veut que nous prenions des photos d'elle, nous lui demandons
ensuite s'il y a une adresse ici, mais malheureusement la poste
ne semble pas venir si loin. Elle nous montre un endroit dans
le village où il y a des crocodiles enfermés dans
un enclos en brique (impressionnant !). Ensuite nous lui demandons
pourquoi elle ne va plus à l'école alors qu'elle
se débrouille bien en anglais, "Ma maman préfère
que j'aille vendre des bracelets aux touristes, ça rapporte
plus" mais on sent bien dans sa voix qu'elle aimerait bien retourner
à l'école comme d'autres de ses copines qui viennent
nous voir plus tard. Nous sommes tristes et en colère de
ne rien pouvoir faire pour cette petite qui est pourtant si intelligente.
"ne rien acheter aux enfants" en tous cas ça c'est sûr,
si les touristes arrêtaient de faire halte dans ce village,
nous sommes sûr qu'elle retournerait dare-dare à
l'école.
Bon, on ne veut pas juger sa famille, mais on a l'impression que
le papa de Daa faisait moins de choses de ses journées
qu'elle... Mais ne jugeons pas à l'occidentale, nous ne
savons pas tout. Nous passons une très bonnes soirée
avec Daa et Jane sa meilleure copine. Le soir, nous voulons leur
offrir un Coca à l'épicerie mais elles refusent
en nous disant de garder nos sous pour la Thaïlande car sinon
nous n'en aurons plus, nous sommes gênés... Nous
faisons donc beaucoup de photos et rigolons en les regardant ensuite
sur le petit écran, la nuit nous dormons tous dans la même
pièce. Le matin Jane et Daa nous accompagnent jusqu'à
la piste, Maud leur apprend que l'on peut dire au revoir en s'embrassant
et elles sont ravies. De grands au revoir et un gros pincement
au coeur nous accompagnent (Que deviendront Daa et Jane ?) Des
questions restent en suspens : Pourquoi la maman de Daa nous a
acceptés chez elle gratuitement alors que normalement sa
fille vend des choses aux touristes ? Pourquoi son père
ne fait-il pas des toilettes derrière les quelques planches
de bois qu'il a déjà ? Pourquoi Daa est si bien
habillée par rapport au reste de sa famille ?
Derniers jours au Cambodge
Les derniers jours dans ce pays
des contrastes seront durs. Route boueuse un jour, poussière
le lendemain, nos bras et Fends La Bise demandent pause. Nous
sommes choqués par les agents du gouvernement qui roulent
à toute allure et rentrent dans les villages en klaxonnant
sans se soucier s'ils vont écraser un enfant. Une autre
fois, une voiture de police s'arrête dans un village et
sans descendre de la voiture demande à un enfant qu'il
leur rapporte 2 Cocas dans la glacière. Dédaigneux
avec leurs regards supérieurs, ils jetteront ensuite la
bouteille vers l'épicerie avant de démarrer en trombe.
La corruption gangrène ce pays et toute la population en
souffre. A la frontière, on sent tous les trafics avec
la Thaïlande, des casinos se construisent en zone Duty Free,
les contrastes sont saisissants. Nous quittons la route defoncée
pour rejoindre l'autoroute lisse de Thaïlande. Au revoir
Cambodge et bonne chance pour la suite !
|
|